Le bébé dort

« Et si deux comédienn.es décident de se programmer deux dates dans un théâtre et se laissent trois mois pour créer un spectacle ? Qu’est ce qu’ils ont à dire ? Qu’est ce que ça va raconter ? Où est ce que ça va parler ?

C’est le pari fou-fou que se sont fait Jade Lohé et Romain Pichard.

Tout, depuis les textes (avec la participation de Madeleine Arminjon), jusqu’à l’interprétation, ils ont tout fabriqué. Et fabriqué n’est pas un mot innocent. Parce que c’est ça, leur spectacle, ce qui est sorti d’eux. C’est une grande fabrique de possibles, d’amours, de désirs, de fragilités, de trucs moins nobles aussi.

Deux artistes qui se laissent voir dans leur absolu nécessité de dire quelque chose de puissant et d’être bandant, dans leurs atermoiements, qui veulent être pris en pitié, pris dans les bras, être admirés, que les gens se jettent à leurs pieds, qu’on les reconnaisse, qu’on les entende, que la colère qui était là revienne avec sa nécessité à être criée…

C’aurait pu vite tourner au plaisir solitaire, égocentré-centrique, nous laisser en dehors, oublié.e.s. Mais c’est tout l’inverse qui se passe, parce que ce qui baigne toute cette forme d’une lumière si particulière, c’est leur générosité, ce partage permanent et sans concession, sans concession pour les acteurices, sans concession pour les spectateurices non plus.

(…) C’est rarement réussi ce genre de chose, d’envie de rencontre entre « scène » et « salle », assez rarement en tout cas, pour se réjouir quand enfin ça fonctionne, et là ça fonctionne de bout en bout. Jade Lohé et Romain Pichard s’offrent à nous et à toustes et on ne peut pas faire autrement que de le prendre pour soi, tout pour soi. »

Matthias Claeys